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Forte affluence au Colloque Pauvreté: rencontre entre terrain et recherche

Publié le 10.10.2017. Mis à jour le 05.05.2021.

Environ 200 personnes, pour la plupart actives dans le travail social, ont participé les 5 et 6 octobre 2017 à la quatrième édition du Colloque Pauvreté à l’Université de Lausanne. Intitulé «Pauvreté et intervention sociale: un accompagnement impossible ?», cet événement a proposé pendant deux jours 8 conférences et 13 ateliers, et surtout une formidable plateforme d’échanges informels entre professionnelles et professionnels engagés dans diverses formes d’action et les chercheuses et chercheurs travaillant sur les politiques sociales.

Les travailleuses et travailleurs sociaux d’une multitude d’institutions publiques et privées de plusieurs cantons romands ont été très nombreux à participer pendant ces deux jours au Colloque Pauvreté, dont la dernière édition avait eu lieu en 2014 et la première en 2010.


Organisé par le Département vaudois de la santé et de l’action sociale (DSAS), l’Institut des sciences sociales (ISS) et l’Institut de hautes études en administration publique (IDHEAP) de l’Université de Lausanne, en collaboration avec la Haute école de travail social et de la santé (EESP Lausanne / HES-SO), le Centre de compétences suisse en sciences sociales FORS et le Pôle de recherche national LIVES, cette quatrième édition était centrée sur les processus et les acteurs impliqués dans l’assistance aux bénéficiaires.


Les intervenants ont apporté des éclairages différents sur la thématique de l’intervention sociale, selon leur profil et leur expérience. L’intérêt de ce colloque est justement de faire dialoguer plusieurs perspectives sur un sujet d’intérêt commun: la lutte contre la pauvreté.

Vice-recteur de l’Université de Lausanne, Giorgio Zanetti a accueilli la manifestation en soulignant que 14% de la population vaudoise était exposée au risque de pauvreté, un chiffre transposable au niveau suisse. La rectrice de la HES-SO, Luciana Vaccaro, était également présente à l’ouverture pour soutenir l’événement et a déclaré que «les travailleurs sociaux et les chercheurs maintiennent le lien social dans un contexte de tension continue.»

Les conférences plénières ont abordé la question de l’accompagnement des populations précaires sous plusieurs angles.

Emilie Graf, co-secrétaire générale d’Avenir social, association suisse des travailleurs et travailleuses sociales, a décrit une profession en pleine mutation, de plus en plus tiraillée entre des impératifs de résultats et la précarisation croissante des bénéficiaires, dans un contexte de méfiance généralisée envers les personnes assistées. «Quand on attaque les pauvres, on attaque souvent aussi les travailleurs sociaux», a-t-elle déclaré, appelant à une professionnalisation nécessaire des acteurs et une meilleure visibilité de leur travail, et rappelant que 25 à 30% des personnes à l’aide sociale en sortent au bout d’une année.

Anne Perriard, maître assistante à l’Université de Genève et auteure d’une thèse réalisée dans le cadre du Pôle de recherche national LIVES, a quant à elle déconstruit les normes d’âge qui sont à l’œuvre dans l’application des politiques sociales. Montrant que certaines dépendances financières étatiques paraissent plus problématiques que d’autres en fonction de ces normes d’âge, elle a remis en question le mythe de l’indépendance totale et montré que «la catégorisation par âge rend invisible d’autres systèmes d’inégalité comme le genre, la classe ou l’ethnicité».

D’autres conférences ont été délivrées soit par des responsables d’institutions publiques, comme Yasmine Praz Dessimoz, directrice de l’action sociale à l’Hospice général de Genève, ou Ludwig Gärtner, vice-directeur de l’Office fédéral des assurances sociales (OFAS), soit par des orateurs issus du monde académique, comme Vincent Dubois, professeur à l’Université de Strasbourg, et Véréna Keller, professeure honoraire de la HES-SO.

Le cas du canton de Vaud a été très présent, avec la présentation du récent Rapport social vaudois par Caroline Knupfer, secrétaire générale adjointe au DSAS, et Judith Kühr, responsable de recherche dans le même département, qui ont appelé à privilégier «un regard global sur la pauvreté», prenant en compte les causes structurelles et les caractéristiques individuelles des personnes à assister.

Le conseiller d’Etat en charge du DSAS, Pierre-Yves Maillard, a défendu l’action du canton, évoquant la forte croissance des dispositifs d’aide au cours des deux dernières législatures et affirmant que «si cette politique sociale ne se fait pas, on creuse encore plus les inégalités».

Les treize ateliers ont été l’occasion de réfléchir plus en détail aux différentes stratégies d’intervention sociale en fonction des divers types de bénéficiaires. Animés par des binômes de représentant·es de la recherche et du terrain social, ils ont permis aux participant·es de prendre du recul sur leur pratique, d’exposer leurs difficultés, et surtout de développer leur réseau. Cette dimension est en effet plus importante que jamais dans le travail social, soumis à une complexification des dossiers, des procédures et des acteurs.