TERRAPADS - Construire des bâtiments entiers en terre crue compressée
Ingénierie et Architecture Projets de recherche appliquée et développement Genève
Le secteur de la construction doit relever à l'heure actuelle deux défis majeurs : d'une part l'approvisionnement en matières premières, avec notamment des réserves exploitables de graviers qui s'amenuisent, et d'autre part l'élimination des matériaux d'excavation en raison de l'engorgement des sites de stockage. Rien que le territoire genevois produit chaque année plus de 3,7 millions de tonnes de matériaux d'excavation sur les chantiers. Cela représente deux tiers de l'ensemble des déchets du canton. Pour saisir les enjeux relatifs à ces volumes chiffrés de terres excavées, considérées légalement comme des déchets, il faut préciser que cela correspond mensuellement au volume de trois tours RTS, deux Notre-Dame de Paris ou huitante piscines olympiques.
Valoriser ces terres d'excavation parait une évidence du point de vue de l'économie circulaire. Il y a quelques années, l'entreprise genevoise Terrabloc était la première à se lancer dans ce créneau, en développant des briques de terre compressée recyclée, qui contiennent 4 % de ciment. Pour des chantiers utilisant des blocs de petits formats, la presse à briques peut être amenée directement sur place, où la terre d'excavation est utilisée pour créer des briques du chantier. Il va sans dire, le bilan écologique de l'opération est excellent.
Malheureusement, en raison de nombreux facteurs, seules 15 % des terres d'excavation sont actuellement recyclées à Genève. Parmi les raisons, on peut citer l'image négative de la terre qui - légalement - constitue un "déchet", la puissance des lobbys du béton, ou encore les difficultés à modifier les habitudes des différents acteurs du domaine de la construction. Malgré les obstacles, la demande pour les blocs en terre compressée progresse, mais principalement pour des murs non-porteurs.
Afin de faire certifier ses blocs de terre compressée stabilisée en grand format pour des applications de murs porteurs, Terrabloc a fait appel à une équipe de la Haute école du paysage, d'ingénierie et d'architecture de Genève (HEPIA). Dans leurs laboratoires, cette dernière a procédé à de nombreux tests de résistance sur plusieurs centaines de blocs. Les ingénieur-es ont ensuite analysé leurs propriétés lorsqu'ils étaient assemblés sous forme de murs de différentes tailles. Les expériences ont toutes démontré la solidité des briques et des murs, ainsi que leur correspondance aux normes en vigueur. Ces résultats encourageants confèrent une confiance suffisante pour le lancement d'un projet de bâtiment d'habitation de cinq étages porteurs à Zurich. Une première mondiale.
Si cette certification ouvre des possibilités intéressantes pour Terrabloc, elle a aussi permis à l'équipe d'HEPIA d'acquérir des savoirs en lien avec la composition et les propriétés des briques de terre, qu'elle pourra utiliser dans d'autres projets. Car si le chemin à parcourir est encore long, le bilan écologique, ainsi que le confort en termes de température et d'humidité des constructions en blocs de terre, font de ces derniers un matériel d'avenir.
Un appel à projets destiné aux entreprises impactées par la crise sanitaire
Le projet décrit ci-dessus fait partie d'un appel à projets extraordinaire intitulé "Après Covid-19". Il a été lancé en juillet 2020 par le Conseil de domaine Ingénierie et Architecture de la HES-SO. Ces fonds sont destinés aux professeur-es proches des sociétés de services et d'entreprises suisses impactées par la crise sanitaire. Les hautes écoles concernées par cet appel à projets sont :
- HE-Arc Ingénierie ;
- Haute école d'ingénierie et d'architecture de Fribourg - HEIA-FR ;
- Haute école du paysage, d'ingénierie et d'architecture de Genève (HEPIA) ;
- HES-SO Valais/Wallis - Haute Ecole d'Ingénierie - HEI ;
- Haute Ecole d'Ingénierie et de Gestion du Canton de Vaud - HEIG-VD ;
- CHANGINS - Haute école de viticulture et œnologie.