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Pvssy Talk, une plateforme pour s'informer sur les douleurs sexuelles

Interview Publié le 24.06.2024. Mis à jour le 29.07.2024.

Fondée par Anne-Soorya Takoordyal, diplomée de la HEAD – Genève, la plateforme Pvssy Talk vise à faciliter les échanges et le partage de connaissances sur les douleurs sexuelles des femmes et personnes à vulves, en utilisant des formats interactifs et inclusifs. Ce projet a récemment été lauréat du Prix du Forum de l'Innovation Sociétale avec un soutien de 10'000.- de la Fondation Leenaards. Interview.

Anne-Soorya Takoordyal (au centre), lors de la remise du Prix du Forum de l'Innovation Sociétale 2024 © HUB Entrepreneuriat et innovation UNIL / Shervine Nafissi

Pouvez-vous nous présenter le concept de Pvssy Talk ?

Pvssy Talk est une plateforme en ligne qui permet aux femmes et aux personnes à vulve de s'informer sur leurs douleurs sexuelles, comme par exemple le vaginisme, l'endométriose, la vulvodynie, tout un ensemble de douleurs sexuelles qui touchent à la vulve, au vestibule et jusqu'à l'utérus, voire plus.

Quelle est l'origine de ce projet ?

En 2017, j'étais étudiante en Bachelor Communication visuelle à la HEAD – Genève et je me suis intéressée à la question de la maltraitance médicale sur les patient·es, en particulier celles et ceux qui souffrent de douleurs sexuelles. Suite à cela, en tant que designer graphique, j'ai réfléchi à une solution qui pourrait être utile pour les patient·es. J'ai donc eu cette idée qui était à la base une application et qui est aujourd'hui un site internet, avec également une page Instagram afin de pouvoir communiquer avec un public différent.

Que vous ont apporté vos études à la HEAD – Genève ?

En tant que designer graphique, ma formation a facilité plusieurs étapes du projet : avoir une meilleure vision d'ensemble, réfléchir au concept du point de vue des utilisateurs et utilisatrices et comprendre facilement les besoins pour la création d'un site web et d'une identité visuelle.

Vous avez été incubé par Pulse Incubateur HES. Quels sont les atouts d'un tel accompagnement ?

Cela m'a permis de lancer le projet et d'avoir accès à un réseau, que ce soit via les intervenant·es de Pulse Incubateur HES mais aussi via les autres porteur·ses de projets incubées au même moment que moi. C'est grâce à elles et eux que j'ai pu rencontrer des gens qui ont intégré l'équipe de Pvssy Talk.

Pulse a également été une grande aide pour développer la communication, diffuser le projet, avoir accès à des expert·es, par exemple au niveau législatif et administratif, et ainsi développer le projet dans des domaines que je maitrisais moins. 

On trouve sur Internet d'autres sites web qui abordent ces sujets. Comment se démarquer ?

Il existe effectivement déjà du contenu pertinent et intéressant sur l'éducation sexuelle, en particulier sur les réseaux sociaux. Cela m'a fait réfléchir au début mais on m'a beaucoup encouragé pour que je me lance. La particularité de la plateforme Pvssy Talk est de ne pas se concentrer sur un seul type de douleur mais de traiter de différents types de douleurs dont on parle peu ou qui restent encore taboues ou sous-diagnostiquées. De plus, on a fait le choix de nous concentrer sur la Suisse : nous proposons des solutions et des spécialistes en Suisse et la France voisine.

Quels sont vos partenaires, au niveau ressources et finances ?

Je suis entourée de différentes personnes qui m'accompagnent et gravitent autour du projet. Il y a notamment une équipe de psychologues, sexologues, psychotraumatologues, médecins. 

Pour développer Pvssy Talk, j'ai fait des recherches de fonds, ce qui a permis de rémunérer chaque personne qui a participé au projet. Il y a aussi un système de don : les personnes peuvent aider à financer le projet, ce qui permettra de financer de nouveaux articles sur d'autres douleurs dont nous n'avons pas encore parlé, faute de moyens pour le moment.

Vous avez obtenu le Prix du Forum de l'Innovation Sociétale et un soutien de 10'000.- de la Fondation Leenaards. Qu'est-ce que cela représente pour vous ?

C'est très encourageant et valorisant d'obtenir un tel prix. J'ai débuté ce projet en 2017 et de manière professionnelle dès 2021. C'est un projet au long cours et il peut parfois y avoir des baisses d'énergie, des périodes plus difficiles car la question financière revient souvent. Obtenir un tel prix donne un coup de boost, un regain d'énergie et cela permet de sentir que le projet est pertinent.

Recevez-vous des feedbacks d'internautes ?

Nous recevons effectivement de nombreux feedbacks, souvent positifs. Nous recevons des remarques constructives sur les contenus dont nous faisons part à l'équipe des soignant·es. Ce sont des retours très importants, en particulier de la part des patient·es qui expriment leur ressenti et leur vécu.

Il peut arriver aussi d'avoir des commentaires plus négatifs notamment sur notre choix d'utiliser le langage inclusif car les douleurs sexuelles concernent à la fois les personnes cisgenres, trans et non-binaires. Cela ne plait pas à tout le monde. C'est compliqué à encaisser mais c'est malheureusement le jeu des réseaux sociaux. 

Et de la profession ?

Le corps médical nous donne des retours très positifs et encourageants, ce qui est très valorisant. Au début, il y avait pas mal de méfiance, on m'a posé beaucoup de questions sur le but de mon projet. Mais l'objectif n'est pas de creuser le différend entre le corps médical et les patient·es, mais au contraire de bien se comprendre, bien communiquer. 

On travaille avec une jeune équipe de médecins et on voit un changement de discours, de termes et de positionnement de leur part. L'écoute est différente et on sent que cette jeune génération fera davantage attention aux patient·es, prendra davantage en compte leurs douleurs, les croira - car c'est un problème actuellement - avec davantage de bienveillance.

Quelles sont les prochaines évolutions de la plateforme ?

On aimerait continuer à développer des articles sur d'autres douleurs, on cherche encore une partie des fonds. Pour le moment on s'est davantage focalisé sur les patient·es, leurs besoins avec de la vulgarisation de contenus. Pour la suite on aimerait également changer les choses au niveau de la formation des soignant·es, de la recherche.